Drunk, de Thomas Vinterberg (critique)
De Céline B. pour BU

Synopsis : Quatre amis décident de mettre en pratique la théorie d’un psychologue norvégien selon laquelle l’homme aurait dès la naissance un déficit d’alcool dans le sang. Avec une rigueur scientifique, chacun relève le défi en espérant tous que leur vie n’en sera que meilleure. Si dans un premier temps les résultats sont encourageants, la situation devient rapidement hors de contrôle.
Comme Festen à son époque, le nouveau film de Thomas Vinterberg renferme, dans son simple titre, toutes les possibilités qui vont s'établir au sein des deux heures à suivre. Tandis que la « fête de famille » réunie en 1998 tournait au règlement de comptes, Drunk (druk dans sa langue d'origine) s'établit, selon son énoncé, vers une plongée au cœur de l'ivresse. En s'invitant dans le quotidien monotone de quatre meilleurs amis, le réalisateur de Submarino questionne la quête de l'enivrement obligatoire et la crise du milieu de vie.
Jouant des attentes, le film déroule, de prime abord, le piste d'une comédie mettant en scène une cocasse théorie où l'homme aurait besoin d'alcool pour vivre normalement. Dans le flot d'une existence rythmée par le travail et la famille, l'expérience glisse vers le drame et les rires complices du début se muent rapidement en rictus inquiets. Si la tragédie couve derrière la désinhibition, Thomas Vinterberg n'évoque jamais frontalement l'alcoolisme en érigeant la morale comme réponse sans choisir la voie de l'incorrection.

Pourquoi boit-on ? Que trouve l'être humain de réellement réconfortant dans l'ébriété qu'il ne pourrait expérimenter ailleurs ? Le cinéaste évite cette épineuse interrogation tout en laissant également de côté l'idée de l'alcool comme rite social, comme fuite face à l'inconfort et à l'absurdité de nos vies. Il abandonne des considérations trop radicales pour un long-métrage plus programmatique que prévu sur son sujet de départ, traversé par le deuil de sa fille cadette, disparue dans un accident de voiture en 2019.
À l'écran, il retrouve surtout son comédien fétiche, le magnétique Mads Mikkelsen, huit années après La Chasse. Pour celui qui aurait probablement décroché un second prix d'interprétation masculine si l'édition 2020 du Festival de Cannes s'était tenue, Drunk représente une énième preuve de son immense talent. En un regard, l'acteur sait capter la juste intensité, la bonne émotion pour tout dire sans mot, ni fioriture. Dans une scène finale euphorisante, il s'improvise danseur frénétique, magicien des pas au son du titre What A Life. En cette période de pandémie où les corps en mouvement ne se touchent plus, on ne saurait rêver me