Le roman d'anticipation, mise en garde ou projection de notre avenir ?
Par Céline B. pour BU
Depuis les débuts de la pandémie de coronavirus, la littérature représente une échappatoire intellectuelle afin de s'extirper, pour quelques instants au moins, du poids accablant des nouvelles et des confinements. Source d'inquiétude sur les changements majeurs de notre société, la période que nous traversons est aussi l'occasion de regarder plus en détails ses dérives et ses potentielles évolutions. Passés ou présents, certains auteurs avaient déjà envisagé le parfum du cataclysme à venir dans des romans d'anticipation plus que jamais utiles pour (r)éveiller les consciences.

Le plus connu : 1984, de George Orwell
Référence absolue du roman d'anticipation, de la perspective dystopique et de la science-fiction, 1984 demeure, soixante-dix ans plus tard, un texte fondateur, souvent réinjecté dans la culture populaire. Lui-même inspiré de l'ouvrage Nous Autres, écrit par l'auteur russe Ievgueni Zamiatine en 1920, et de La Kallocaïne imaginée par la suédoise Karin Boye, l’œuvre de George Orwell s'interroge sur les dérives d'un monde qui a basculé vers les extrêmes. L'écrivain installe son intrigue à Londres en 1984 alors que la planète est désormais divisée en trois continents, l'Eurasia, l'Estasia et l'Océania, dirigés par des partis communistes devenus totalitaires. Par l'intermédiaire de Winston Smith, un londonien employé du Parti, le récit donne à voir une société où la liberté d'expression n'existe plus, où les vies privées ont volé en éclats sous le pouvoir de Big Brother. Dans une atmosphère envahie par la technologie et le numérique, sa relecture est une prise de conscience implacable du point de rupture à ne jamais atteindre.
Date de parution : 1949
376 pages, Éditions Gallimard

Le plus viscéral : La Route, de Cormac McCarthy
Considéré comme l'un des plus grands écrivains américains de sa génération, Cormac McCarthy est connu pour des œuvres sombres, violentes et souvent désespérées. Après le succès retentissant de No Country For Old Men en 2005 (adapté au cinéma par les frères Coen en 2007), La Route reste son dernier roman, une plongée dans une Amérique post-apocalyptique. À travers l'itinéraire de survie d'un père et de son fils, livrés à un monde hostile, l'auteur transforme sa narration en récit sec, d'une âpreté étonnante, aux prises avec les visions d'épouvante d'une société balayée. Prix Pulitzer en 2007, il questionne surtout son lecteur sur la condition humaine, la foi en un Dieu absent et les rapports filiaux, derniers refuges de l'humanité.
Date de parution : 2006
244 pages, Éditions de l'Olivier